Les relations entre le Niger et le Bénin, autrefois cordiales, se sont considérablement détériorées depuis le coup d’État militaire au Niger en juillet 2023. Cette rupture diplomatique a ses racines dans la position ferme adoptée par le Bénin concernant les sanctions imposées par la Communauté économique des États d’Afrique à l’encontre du Niger.
Les révélations explosives du général Tiani
Dans une interview accordée à la télévision nationale nigérienne, le général Abdourahamane Tiani, chef du régime militaire au pouvoir au Niger, a lancé de nouvelles accusations contre la France, l’accusant de manœuvres de déstabilisation contre son pays. Selon Tiani, la France aurait redéployé ses agents de renseignement, précédemment expulsés du Niger, dans les pays voisins, notamment au Nigeria et au Bénin. Ces agents, décrits comme des « groupes subversifs », opéreraient en civil, parfois en collaboration avec des éléments des forces armées béninoises, également en tenue civile.
Le général Tiani a fourni des détails précis sur ces supposées activités françaises au Bénin. Il affirme que la France aurait loué des hélicoptères Super Puma et positionné du personnel et du matériel dans divers endroits stratégiques du pays, notamment à l’aéroport international de Tourou et dans la ville de Kandi. Ces actions, selon Tiani, s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à déstabiliser le Niger en réponse au coup d’État qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum.
Une guerre de l’information dans un contexte régional tendu
Ces accusations s’ajoutent à une série de déclarations hostiles envers la France depuis le coup d’État de juillet 2023. Le régime militaire nigérien a systématiquement dénoncé les accords militaires avec Paris et multiplié les critiques à l’encontre de l’ancienne puissance coloniale. Cette rhétorique anti-française ressemble à une partie d’échecs diplomatique, où chaque mouvement vise à renforcer la légitimité du nouveau régime tout en discréditant ses opposants présumés.
Le conflit diplomatique entre le Niger et le Bénin peut être comparé à une danse complexe, où chaque pas est calculé pour influencer l’opinion publique et la position des autres acteurs régionaux. Le Niger, en fermant sa frontière et en coupant l’approvisionnement en pétrole, utilise ses ressources comme levier de négociation, tandis que le Bénin se trouve dans la position délicate d’allié régional accusé de complicité avec une puissance étrangère.
Vers une reconfiguration géopolitique au Sahel ?
La situation actuelle pourrait avoir des implications significatives pour l’équilibre des pouvoirs dans la région du Sahel. Le rapprochement du Niger avec le Burkina Faso et le Mali, tous deux également dirigés par des régimes militaires, suggère l’émergence d’un nouveau bloc géopolitique. La création de l’Alliance des États du Sahel (AES) par ces trois pays illustre cette dynamique de recomposition régionale.
L’annonce du général Tiani concernant le partage potentiel des ressources pétrolières du Niger avec ses alliés de l’AES pourrait redessiner la carte économique et stratégique de la région. Cette initiative pourrait non seulement renforcer les liens entre ces pays, mais aussi réduire leur dépendance vis-à-vis des puissances occidentales et des organisations régionales traditionnelles comme la CEDEAO.
Dans ce paysage en mutation, la France se trouve dans une position délicate. Les accusations répétées du Niger mettent à mal son influence dans une région qu’elle considère comme stratégique pour ses intérêts sécuritaires et économiques. La fermeture de l’ambassade française à Niamey et l’impossibilité d’assurer une assistance consulaire aux ressortissants français sur place témoignent de la profondeur de cette crise diplomatique.