Plusieurs personnes ont été tuées dans des heurts entre partisans de l’opposition et forces de l’ordre, mercredi, à Conakry, trois jours après l’élection présidentielle guinéenne. Les résultats partiels, qui donnent Alpha Condé, le président sortant, en tête au premier tour sont vivement contestés par son rival Cellou Dalein Diallo, qui revendique la victoire. Son parti, l’Union des forces démocratiques (UFDG) dénonce « une fraude à grande échelle ».
C’était le scénario redouté par de nombreux Guinéens, celui des violences post-électorales. Au moins neuf personnes ont été tuées dans des heurts entre partisans de l’opposition et forces de l’ordre, mercredi 21 octobre à Conakry, trois jours après une présidentielle organisée à l’issue de plusieurs mois de contestation meurtrière contre un troisième mandat du président Alpha Condé, 82 ans.
« Au moins trois personnes ont été tuées, que j’ai vues de mes propres yeux entre Lambanyi et Sonfonia », deux quartiers de la banlieue nord de la capitale, « une dizaine d’autres ont été blessées », a déclaré à l’AFP l’adjudant Mamadou Kéganan Doumbouya.
Selon Hadjiratou Barry, une habitante du quartier de Bailobaya, son frère a été « tué par les forces de l’ordre qui lui ont tiré dessus alors qu’il tentait de fuir ». Un médecin ayant requis l’anonymat a assuré avoir reçu « deux corps et neuf blessés » dans une clinique.
De leur côté, les autorités guinéennes évoquent un bilan de neuf morts dont un policier au cours de ces violences post-électorales.
Selon le parti de Cellou Dalein Diallo, les scènes de joie qui ont suivi sa déclaration de victoire lundi avaient entraîné des violences qui ont fait quatre morts dans ses rangs.
Frondes et gaz lacrymogène
Depuis le début de la matinée mercredi, une épaisse fumée noire s’échappait de plusieurs carrefours de la route Le Prince, qui traverse les fiefs de l’opposition dans la banlieue de la capitale, où des barricades ont été placées sur la route et enflammées.
Dans l’un de ces quartiers populaires, Wanindara, les forces de l’ordre peinaient à contenir des dizaines de jeunes sortant des ruelles pour se rassembler sur la route principale, jetant des pierres sur les policiers qui répondaient à coups de gaz lacrymogène, de pierres et de frondes.
Des coups de feu continuaient à être entendus dans le quartier de Hamdallaye Rond-Point en début d’après-midi, selon une habitante jointe par l’AFP. De nombreux témoins ont rapporté avoir entendu des tirs et d’autres ont affirmé qu’il y avait d’autres victimes, sans que ces informations puissent être vérifiées dans l’immédiat de source indépendante.
Des heurts ont également éclaté mercredi à Mamou et Labé, dans le centre du pays, selon des sources sécuritaires et diplomatiques en Guinée.
Domicile encerclé
Mardi en début de soirée, le domicile de Cellou Dalein Diallo a été encerclé par environ 25 gendarmes et policiers, équipés de casques et de boucliers et soutenus par deux camions anti-émeute, a constaté un journaliste de l’AFP.
« Ne pouvant faire face à la vérité des urnes, le régime anti-démocratique d’Alpha Condé tente de s’imposer par la force. Il est temps pour la Guinée de tourner la page de ce régime liberticide et fratricide », a écrit sur Twitter Cellou Dalein Diallo.
Le président sortant Alpha Condé, qui brigue à 82 ans un troisième mandat controversé, a pour sa part lancé sur les réseaux sociaux un « appel au calme et à la sérénité, en attendant l’issue du processus électoral en cours dans [le] pays ».
« Il y aura un vainqueur »
La commission électorale nationale a annoncé mardi soir de premiers résultats du scrutin de dimanche portant sur quatre des 38 circonscriptions du pays, dont trois à Conakry et sa périphérie.
Alpha Condé l’emporte largement dans les quatre circonscriptions sur son principal rival Cellou Dalein Diallo, 68 ans, et dépasse les 50 % dès le premier tour dans trois d’entre elles, selon ces résultats, qui ne permettent pas « d’extrapoler » un résultat national, selon un responsable de la commission électorale.
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Le camp de Cellou Dalein Diallo a accusé celui du chef de l’État de « tout mettre en œuvre pour faire modifier les résultats sortis des urnes en sa faveur ».
« Bien sûr qu’il y aura un vainqueur, mais ce n’est pas pour autant que la démocratie sera menacée ou que la paix sociale devient impossible. Si la victoire me revient, je reste ouvert au dialogue et disponible à travailler avec tous les Guinéens », a assuré mercredi Alpha Condé, en se disant « conforté » par les premiers résultats publiés.