Cotonou, 30 octobre 2024 – L’alternance au pouvoir, élément fondamental d’un système démocratique, semble aujourd’hui mise à mal au Bénin. À mesure que les régimes se succèdent, la question de l’état réel de la démocratie dans le pays se pose avec acuité. Les règles de la démocratie, jadis respectées, s’érodent progressivement, et la marginalisation des minorités politiques suscite de vives inquiétudes.
La marginalisation des minorités : une réalité inquiétante
La situation devient de plus en plus préoccupante, surtout depuis le début de la 9ème législature. Les séances parlementaires ont révélé l’isolement du parti d’opposition, « Les Démocrates », tandis que la société civile, réduite à sa portion congrue, est quasi absente du débat public. Philippe N’Seck, ancien journaliste à l’Office de Radiodiffusion et Télévision du Bénin (ORTB), souligne ce phénomène, avertissant que “la question de la place de la minorité au sein de l’écosystème politique national est source de fortes tensions”.
Une démocratie sans inclusivité ?
Dans sa tribune intitulée Parlons-en : peut-on parler de démocratie sans une minorité ?, N’Seck affirme qu’aucune démocratie n’est viable si elle n’accorde pas une attention adéquate aux voix minoritaires. La démocratie doit être inclusive et participative, intégrant toutes les opinions. À l’inverse, l’exclusion engendre frustration et radicalisation, menaçant ainsi la paix sociale et le vivre ensemble au Bénin.
La dérive autoritaire
Depuis l’avènement du renouveau démocratique, une tendance inquiétante semble se renforcer : les acteurs politiques se croient investis d’un droit absolu sur les citoyens une fois élus. Cela se traduit par des comportements autoritaires où les critiques sont mal perçues. Les exemples sont nombreux : après les régimes démocratiques des années 1990, les gouvernements successifs, notamment celui de Patrice Talon, ont vu la scène politique se refermer sur elle-même. Le débat contradictoire a disparu, et les voix dissidentes sont systématiquement réprimées.
Un climat de peur et d’intimidation
Face à la critique, le régime a instauré une politique de tolérance zéro. Les dissidents sont souvent soumis à des campagnes de dénigrement, leurs opinions étant rejetées au profit d’une pensée unique. Les thuriféraires du régime n’hésitent pas à fouiller dans le passé de ceux qui osent contester, brandissant le slogan “tous ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous”. Cette atmosphère étouffante ne fait qu’aggraver la situation, faisant peser un lourd fardeau sur l’exercice de la démocratie.
La démocratie est avant tout l’exercice du pouvoir par la majorité, mais il est impératif de garantir aux minorités le droit d’expression et un espace pour un regard critique sur la gouvernance. Ne pas le faire serait franchir une ligne dangereuse, susceptible de fragiliser davantage la démocratie au Bénin.